La ronde des labels
Les appellations labellisantes sont devenues un paramètre incontournable de toute approche territoriale. Ces marques collectives et leurs signes distinctifs font généralement l’objet d’un affichage ostentatoire à l’entrée des communes qui en possèdent. Leurs origines et leurs conditions d’obtention, comme l’étendue des champs couverts, sont très variées. Cependant, il y a toujours à la clé la recherche d’une reconnaissance, ainsi que le signalement de qualités particulières. Il n’y a plus de limite à l’aire d’influence recherchée depuis l’invention du label “patrimoine mondial”. Les collectivités territoriales sont un moteur important pour la vitalité de la grande famille des “labels” marquant le paysage français. L’enjeu pour les détenteurs est alors de susciter un détour ou un arrêt de la part des chalands. Si une bonne part de cette course aux “labels” a une finalité mercantile, il y a aussi de la fierté à pouvoir montrer de la beauté ou de l’histoire, ainsi qu’un besoin de marquer ses différences et son identité. Il est également intéressant d’observer cette course folle, qui touche tous les domaines, comme une forme de réponse à la banalisation, aux mutualisations des gestions territoriales et à la mondialisation.
S’il y a un enjeu commun entre l’État et les collectivités pour la préservation de bâtiments, de paysages ou de territoires, force est de constater que les objectifs poursuivis par les uns et les autres aboutissent à une utilisation et une perception différente des labels. Localement, l’effet promotionnel est prépondérant tandis que l’État s’intéresse d’abord à la protection au titre de l’intérêt général, ce qui est logique. De ce fait, environ un millier de “labels servitudes” maillent le territoire pour identifier et préserver des ensembles urbains et paysagers de grande qualité et aucun, à ma connaissance, ne fait l’objet d’un affichage en entrée de ville sous son appellation codifiée.
On peut s’interroger sur cette partition, tandis que les collectivités ont acquis une certaine maturité dans la gestion territoriale, le rôle de l’État évolue du tutorat vers l’accompagnement des politiques d’aménagement et les moyens se resserrent. À partir de la “foire aux labels” proposée dans cet opus de La Pierre d’Angle, on voit bien que la réponse est dans une gouvernance plus partagée et intégrée du cadre de vie.
Philippe CIEREN
Rédacteur en chef